Les maisons d’édition, les illustres et les plus modestes, reçoivent chaque année des milliers de manuscrits. Très peu d’entre eux sont retenus pour êtres publiés. L’auto-édition s’impose de plus en plus comme une solution pour les auteurs dont le livre n’a pas été retenu par un comité éditorial en vue d’être publié. Je voudrais laisser ici mon témoignage en tant qu’auteure, éditée par une maison d’édition pour mes romans, et ayant tout récemment sauté le pas de l’auto-édition pour mes nouvelles.
Avant j’étais contre l’autoédition… mais ça, c’était avant
Le courriel d’une maison d’édition me proposant de signer un contrat d’édition pour mon premier roman, Julia florista, symbolise pour moi un des moments les plus heureux de ma vie (médaille d’argent, derrière la naissance de mes enfants). J’avais beau avoir reçu plus d’une dizaine de lettres de refus de mon texte de la part d’éditeurs, je n’ai jamais renoncé à mon désir d’être publiée avec un contrat d’édition en bonne et due forme. Je ne voulais pas d’une arnaque d’édition à compte d’auteur ou de l’option de l’auto-édition, j’avais besoin de la reconnaissance du métier. Savoir qu’un professionnel du livre juge mon texte assez bon pour parier sur lui, investir de l’argent en espérant en gagner, me donnait une légitimité en tant qu’auteure. Alors, le jour où j’ai reçu cette proposition de contrat d’édition, j’ai eu le sentiment que j’avais atteint l’un des buts les plus essentiels de ma vie.
Et puis, les quelques romans auto-édités que j’avais pu lire me confortait dans mon idée que ce n’était pas vraiment de la littérature : des coquilles à foison, une mise en page inexistante, une couverture pixellisée… Un vrai repoussoir ! Tout cela ne respectait pas, selon moi, ni la littérature, ni les règles de l’art de l’édition.
L’évolution qualitative de l’auto-édition
Depuis le milieu des années 2010, la qualité des livres auto-édités s’est nettement améliorée et celle de certains livres pourtant édités à compte d’éditeur, s’est dégradée. Il y aurait beaucoup à dire sur des personnes qui s’improvisent éditeurs… De même qu’on ne s’improvise pas auteur, boucher ou infirmier, on ne peut pas décider de devenir éditeur sans se former aux métiers du livre. Mais c’est un autre sujet. Mais revenons à nos auteurs auto-édités. Certains écrivains ont commencé par auto-publier leur premier livre et ont rencontré le succès, comme Mélissa Da Costa. D’autres y viennent plus tard, comme Joël Dicker qui a quitté les Éditions de Fallois pour faire le choix de l’auto-édition, alors que sa notoriété et la vente de ses livres étaient au plus haut. C’est sans doute plus sécurisant dans ce sens-là, me direz-vous…
Ce qui m’a poussée vers l’auto-édition
Outre la curiosité de comprendre le processus d’auto-édition, c’est une réalité du marché qui m’a convaincue de sauter le pas : il existe très peu de maison d’édition publiant des nouvelles. Ce genre littéraire de format court est très prisé aux États-Unis, beaucoup moins en France. Bien sûr, il y a quelques maisons spécialisées, comme celle de l’excellente éditrice de L’Ourse brune. Mais elles sont rares et publient peu de livres.
J’avais dans mon escarcelle deux recueils de nouvelles et à la faveur d’un concours sur Amazon, je me suis lancée. Pas tant pour le concours que parce que c’était l’occasion de tenter l’expérience de l’auto-édition.
La plateforme d’Amazon Kindle Direct Publishing et les outils associés (pour mettre en page ou concevoir la couverture) sont très intuitifs. Je précise que je n’ai pourtant rien d’une geek ! On est un peu limité en termes de mise en forme de notre texte. Par exemple, pour avoir un sommaire, ce qui est recommandé, surtout dans le cas d’un recueil de plusieurs textes, et a fortiori dans la version numérique, je n’ai pas réussi à changer le format de la page préconçue et le mot anglais « contents » apparaît au lieu de « sommaire », sans que j’aie réussi à le modifier. La qualité des exemplaires papier n’est pas exceptionnelle non plus.
En revanche, les droits d’auteurs (redevance dans le jargon KDP) sont nettement plus élevés (70% pour le livre numérique et 40% pour le livre papier).
Le texte peut être modifié, avec une prise en compte dans les 72 heures, ce qui est appréciable lorsqu’on découvre une horrible coquille…
L’impression est ultra-rapide, en quelques jours on reçoit ses exemplaires brochés.
La mis en ligne, en particulier de la vente du livre numérique, est très rapide. Amazon met moins de 72 heures là aussi.
Ce n’est qu’un début…
Je n’en suis qu’au lancement de mes deux recueils, Jungles secrètes et Piano à Argenteuil et autres révélations. Il y a sans doute des limites ou des contraintes de l’auto-édition que je n’ai pas encore expérimentées. Néanmoins, pour ce qui est de la partie conception du livre, en tant qu’objet à commercialiser, cela ne m’a pris que quelques heures (disons une petite journée, mis bout à bout). J’attends de voir de quelle visibilité ces textes auto-édités vont pouvoir bénéficier. Je m’interroge sur les outils de promotion des livres. Et in fine, je me demande si les lecteurs vont acheter mes livres auto-édités !
Dans un prochain article, je vous parlerai de ces deux recueils qui me tiennent particulièrement à cœur. L’un sous le signe de la sensualité féminine avec sa part d’ombre et l’autre qui met en lumière des personnages féminins de tous âges (de l’enfant à la retraitée) qui vivent chacune une expérience intérieure décisive.
Ce qui a surtout évolué pour moi, c’est que je n’ai plus de préjugés sur les livres auto-édités, aussi bien en tant que lectrice qu’en tant qu’auteure. J’ai sauté le pas parce que l’édition traditionnelle ne me permettait pas de publier le genre qui me tenait à cœur. Pceux d’entre vous qui aimez gérer un projet de A à Z, qui savez vous entourer de professionnels (de la relecture notamment) et qui n’avez pas peur de vous charger de la promotion de votre livre, l’auto-édition est à considérer sérieusement !